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Keats ou Newton ?

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John Keats, le grand poète anglais du XIXème siècle, écrivait, un jour où il n’était pas très inspiré : « Isaac Newton destroyed the poetry of the rainbow by reducing it to a prism ». Ce que l’on peut traduire par : « Isaac Newton détruisit la poésie de l’arc-en-ciel en le réduisant à l’effet d’un prisme. »

Pour moi, cette phrase est l’exemple même d’une erreur de jugement qui colle aux basques de la Science depuis des siècles et qui colporte cette idée imbécile qu’il y a d’un côté les poètes illuminés et, de l’autre, les obscurs rationalistes. Aujourd’hui encore, on oppose souvent la créativité, les oiseaux, les papillons (le prétendu cerveau gauche) à la Science, au raisonnement, aux équations (le prétendu cerveau droit).

Et, oui, Newton a effectivement expliqué que la lumière blanche était l’addition de plusieurs longueurs d’onde que le cerveau perçoit comme des couleurs différentes et que le prisme avait le pouvoir de séparer ces couleurs pour former un arc-en-ciel, non par magie ni par poésie mais simplement parce que l’angle de réfraction de l’air dans le verre varie avec la longueur de d’onde.

Alors, la question que pose Keats c’est : est-ce que le fait de connaître la vérité scientifique change quoi que ce soit à la poésie de l’arc-en-ciel ? Keats répond que oui. Pire, il affirme que la Vérité tue la poésie. Personnellement, cette idée m’est insupportable parce qu’elle fait l’apologie de l’ignorance et qu’elle nie toute créativité et toute esthétique dans les sciences. La vérité, c’est tout le contraire : il n’y a rien de plus beau qu’un théorème qui, par la raison, vous ouvre les portes de l’éternité. Et – tiens ! – attrapez donc un prisme et faites apparaître une arc-en-ciel dans le creux de votre main. N’est-ce pas simplement beau, même si l’on y voit des longueurs d’ondes ?

Alors non, le monde n’était pas plus beau quand il recelait encore des mystères. Le monde n’était pas plus beau quand nous étions ignorants. Aujourd’hui, nous avons la même imagination qu’avant. Nous savons juste que les monstres marins des confins n’existent que dans nos histoires. En sont-ils moins beaux ?

John Keats, sur ce coup-là, avait bigrement tort. Ca arrive à tout le monde. On ne va pas en faire un fromage…


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